Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LIVRES II-X 119

d'abord, Textrême simplicité des moyens. Très peu de personnages : dans la querelle, Achille et Aga- memnon sont comme isolés ; les émotions des assis- tants n'existent pas pour le poète : il est tout entier à ses acteurs principaux et ne songe aucunement à la foule. En général, du reste, sa poésie n'a pas d'arrière-plan : toute l'action se passe sur le devant de la scène ; c'est un bas-relief plein de vigueur, mais sans perspective. Même simplicité dans les des- criptions. Toutes sont utiles, brèves et fortes ; l'effet en est concentré en deux ou trois traits, quelque- fois en un seul. Le surnaturel prend chez lui quelque chose de naturel : ses dieux sont grands et puis- sants ; ils ont de la majesté, mais point de pompe ; leur intervention dans les choses humaines est libre et franche ; ils ne se dissimulent pas sous des vi- sages étrangers ; Athéné et Thétis apparaissent à Achille sans emprunter pour cela la forme de mor- telles. Tout est donc simple chez ce vieux poète, mais en même temps fort et grand. La vérité des sentiments et des passions lui est familière ; il fait parler et agir ses personnages sans effort apparent, sans subtilité, avec une naïveté pleine d'énergie. D'ailleurs la douceur et la tristesse ne lui sont pas plus étrangères que la force, comme on peut le voir par la scène de Thétis et d'Achille ; mais il a de la gravité et de la réserve jusque dans l'attendris- sement; rien ne lui est plus inconnu que la mol- lesse et la recherche du brillant.

��III

��Il faudrait passer par-dessus les neuf livres qui, dans le poème actuel, viennent immédiatement

��� �