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140 CHAPITRE II. - ANALYSE DE L'ILIADE

longs récils qui vont du livre II au livre X, la situa- tion n'a pas sensiblement changé. On peut raccorder sans le moindre effort le XV livre au P^ Ce n'est même pas assez dire : en réalité, si nous nous les re- présentons comme liés immédiatement l'un à l'autre, non seulement les scènes qui vont suivre n'en souf- frent pas, mais elles y gagnent en valeur morale, parce qu'elles semblent plus naturelles et plus justifiées. Que nous met sous les yeux ce XI* livre ? Une grande bataille livrée et perdue par les Achéens. C'est le matin : Eris, envoyée par Zeus, prépare tout pour que la lutte soit terrible et sanglante. Aga- memnon, plein de confiance et d'ardeur, s'arme pour combattre. Rien de plus naturel après la querelle du 1°** livre, mais rien de moins vraisemblable après les désastres du VIIl* et l'ambassade du IX®*. Avant que la bataille s'engage, Zeus manifeste énergique- ment sa volonté et prend la direction des événe- ments'. Par ses ordres, nul dieu n'interviendra; lui seul conduit les choses à son gré en vue de venger Achille, comme il l'a promis à Thétis. Autant son action était jusqu'alors incertaine et mal combinée, autant elle devient tout à coup ferme et appropriée. Nouvelle preuve du rapport étroit de ce chant avec celui de la Querelle.

��1. Il y a une véritable contradiction morale entre le début du IX" livre, qui nous montre Agamemnon accablé, et cette première scène du XI*', où il est plein d'espoir et d'assurance. Et pourtant dans le poème actuel, ces deux scènes ne sont séparées que par une nuit, pendant laquelle le refus violent opposé par Achille aux ten- tatives de réconciliation d'Agamemnon a dû achever de désespérer celui-ci.

2. Celte dC'claration fait aujourd'hui double emploi avec celle qui figure au début du livre VllI, et elles sont difTiciles à concilier ensemble.

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