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XIV
PRÉFACE

Homère vivait présentement, il ferait des poèmes admirables accommodés au siècle où il écrirait. Nos poètes en font de mauvais ajustés à ceux des anciens et conduits par des règles qui sont tombées avec les choses que le temps a fait tomber. Je sais qu’il y a de certaines règles éternelles pour être fondées sur un bon sens, sur une raison ferme et solide qui subsistera toujours, et qui portent le caractère de cette raison incorruptible… Concluons que les poèmes d’Homère seront toujours des chefs-d’œuvre, non pas en tout des modèles. Ils formeront notre jugement, et le jugement réglera la disposition des choses présentes[1]. » Il est impossible de mieux dire. Ce sont là de belles exceptions à l’esprit du siècle, mais enfin des exceptions, et dont le siècle suivant ne sut pas toujours faire son profit.

On peut dire que toute la critique littéraire du xviiie siècle vient aboutir au Cours de littérature de La Harpe. D’autres critiques, dans le même temps, ont pu avoir les uns plus d’esprit, les autres plus de feu, d’autres encore des idées plus exactes, ou plus originales, ou plus profondes, sur certaines questions particulières : aucun n’est dans l’ensemble un écho plus fidèle ni un plus juste représentant de l’esprit du xviiie siècle. Pour ne parler ici que de la partie de ce Cours qui est relative à l’antiquité grecque, beaucoup de choses assurément y sont à louer, plus même peut-être qu’on ne le dit parfois. Et d’abord,

  1. Cité par M. Egger, Hellénisme en France, t. II, p. 118-119.