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266 CHAPITRE IV. — L'ART DANS L'ILIADE

au tissu du discours, servent non à Tamollir, mais à le rendre plus brillant *.

La structure des phrases et des propositions est souple et variée avec une extrême simplicité. Les assemblages compliqués de pensées sont absolument inconnus de la poésie homérique, même dans les discours, comme nous Tavons fait observer plus haut, et à plus forte raison dans le récit. C'est la juxtaposition qui est la loi ordinaire de ce style naïf et clair. Lorsque par hasard la phrase se prolonge, — ce qui est exceptionnel, — les pensées successives s'ajoutent les unes aux autres dans l'ordre où elles se présentent à l'esprit ; jamais elles ne sont dépla- cées en vue d'enfermer par exemple les propositions incidentes dans la proposition principale ou de par- tager toute la phrase en groupes symétriques. Dans cette série d'additions qui constitue le développe- ment même de la pensée, le poète use d'ailleurs d'une grande liberté. La rigueur de logique cl d'analogie que le progrès de l'esprit analytique in- troduisit plus tard dans la langue lui est encore étrangère*. On peut qualifier d'inexpérience ce lais- ser-aller, et il est certain qu'il tient en effet à un étal d'esprit caractérisé par une réflexion encore élémentaire ; mais il faut reconnaître qu'il s'associe fort bien dans la langue homérique à une connais- sance familière de tous les secrets du style. Celle phrase flottante et si peu lice a parfois une vigueur

1. Iliade, I, 88 : OCîitç iiizû Çûvio; /.a» ini yOovl ospxOfxEvoio. Ces derniers mots équivalent à ^Xc';:ovxo;, mais il n'est personne qui uo sente ce qu'ils ajoutent de force à l'aflirmation eu même temps que de beauté extérieure à l'expression.

2. Voyez sur ce sujet les réflexions de G. Hermann dans sa dissertation: De legibus quibusdam subtilioribus sermonis home^ rici (Opusc.y t. II, p. 18-58).

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