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284 CHAPITRE V. - ANALYSE DE L'ODYSSÉE

lutte admirable, c'est toute la seconde moitié du récit. Avec une imagination aussi puissante que docile à l'idée première, le poète en varie les péri- péties, non pour le plaisir de décrire, mais afin de mettre en lumière pleinement la nature morale de son personnage. Pour lui, Ulysse est tout. C'est lui qui attire nos regards au milieu des flots ; ses émo- tions, une à une, se répètenten nous ; nous partageons son accablement, nous nous associons à ses doutes ou à ses résolutions, nous jouissons de son courage, et à la fin nous triomphons de son succès lorsqu'il touche le rivage, lorsqu'il adresse au fleuve hospitalier une si touchante prière et lorsqu'il embrasse pieusement le sol nourricier.

Rien de suspect dans tout ce beau récit, que quelques vers isolés et sans importance. Nous nous sentons là en présence de l'œuvre d'un poète créateur, impression qui se continue dans les livres suivants.

Les livres VI et VII font étroitement suite au livre V. Mais autour du personnage principal, tou- jours le même, la scène change à vue d'œil, de fa- çon à nous charmer par ha plus agréable diversité. Au lieu de la mer et de la tempête, le calme d'une belle campagne, les rives d'un fleuve large et fé- cond ; puis Taclivité toujours intéressante d'une grande et riche ville maritime, un port, des chantiers, une agora, et à l'écart un superbe palais aux portes d'or et d'argent, paisible et pourtant joyeux au mi- lieu des riches vergci's qui l'entourent \ Tel est

��1. Les raisons qui ont (létcrminé MM. Friedliinder {Philologus, 1851, p. 669 et suiv.) et Kircliliod" à considérer comme une inter- polation la description des vergers d'AIkinoos et ce qui précède immédiatement (v. 103-131) ne me paraissent pas concluantes.

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