Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t1.djvu/363

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suite de développements qui ont été greffés les uns sur les autres.

L’entrevue d’Ulysse et do Pénélope (’OîjTjio); xal IlrjveXoireCa^ 6[jttX(a), annoncée dès le dix-septième livre, remplit presque entièrement le dix-neuvième. Toutefois, avant cette entrevue, Ulysse, Télémaque et la déesse Athéné emportent les armes hors de la grande salle, où les prétendants ont l’habitude de se réunir, et vont les déposer dans une pièce intérieure; morceau épisodique qui a dû être inséré là tardivement*. Au début de l’entrevue, Ulysse est encore insulté par Mélantho, que réprimande Pénélope ; si le rôle de Mélantho n’est pas primitif, il y a eu là nécessairement un remaniement. Mais passons sur les détails. L’entretien des deux époux dans tout son développement est digne des belles

1. Ce morceau a été fait certainement d’après un passage des instructions d’Ulysse à son fils nu seizième livre; plusieurs vers sont même reproduits textuellement. D’autre part, il est en rapport direct avec le passage du livre XXII (v. 141), où Mélantliios dit aux prétendants : « J’irai dans la chambre secrète vous chercher des armes pour vous en revêtir; car sans doute, c’est là, au fond des appartements et non ailleurs, qu’Ulysse et son fils ont déposé les armes. » Toutefois le morceau en question ne s’accorde pas complètement avec le XVI® livre. L’auteur du XYI^ livre a supposé que l’enlèvement des armes devait se faire furtivement, sur un signe d’Ulysse, el par conséquent en présence des prétendants, tandis qu’ici cet enlèvement s’accomplit dans de tout autres conditions. De plus, d’après le XVI« livre, Télémaque devait réserver des armes pour son père et pour lui, ce qu’il ne fait pas au XIX*. L’intention du poêle me parait être de rester ici en accord avec le XXII* livre, où ces armes réservées ne figurent pas. On peut conclure de là que tout ce morceau est un raccord et une conciliation entre le XVI« livre et le XXII«; ces deux récits contradictoires se font, pour ainsi dire, des concessions mutuelles par son intermédiaire, et la contradiction est ainsi affaiblie au point d’échapper à un lecteur ou à un auditeur médiocrement attentif.