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380 CHAPITRE VII. — L'ART DANS L'ODYSSEE

Télémachie. Réconciliée avec son époux, elle a repris sa place au foyer domestique, sans que les souve- nirs du passé s'élèvent entre elle et Ménélas. Si elle les rappelle pour s'accuser, il est le premier à reje- ter sur les dieux la faute et à témoigner que tout ressentiment est éteint en lui. Cette situation est tou- chée délicatement par le poète, avec plus de grâce d'ailleurs que de force ou de profondeur. Partageant l'existence heureuse et opulente de Ménélas, Hélène participe à sa libéralité. Elle a, comme lui, pour le jeune Télémaque une bienveillance charmante, qui se distingue de celle de son époux par une nuance féminine presque maternelle, fort gracieusement indiquée.

Mais de tous les rôles secondaires de femmes dans V Odyssée y il n'en est point qui soit égal en mérite à celui de la jeune Nausicaa. Un tel personnage ne pouvait évidemment figurer dans la légende, qui ne s'arrête point aux scènes purement épîsodiques ; il est dû tout entier à l'auteur du sixième livre ac- tuel. C'est lui qui a conçu ce type si élégant de jeune fille, et qui a su mêler fort heureusement en elle, grâce à l'admirable délicatesse de son génie, la finesse de Tesprit, la grâce, la bonté, la timidité même avec une certaine hardiesse do race qui la distingue entre ses compagnes. Rien de plus char- mant que l'adresse si féminine avec laquelle elle demande à son père la permission de sortir en char. Un songe lui a donné le pressentiment de son pro- chain mariage; elle veut être prête, et pour cela elle propose d'aller laver au fleuve les pièces de toile qui doivent servir à confectionner les vêtements de fête ; mais ce motif vrai, elle le dissimule sous une fine invention :

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