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LES AEDES 407

��III

��Ces aèdes homérîdes de Chios ne durent pas rester enfermés dans leur île natale. Bien qu'ils eussent là leur domicile et la source de leur poésie, ils s'en éloignaient sans cesse pour y revenir. Mem- bres d'une famille et rattachés à un même culte, ils n'en avaient pas moins les mœurs et les habitudes qui étaient alors celles de tous les poètes chanteurs, quels qu'ils fussent.

L'aède était essentiellement nomade. Changer fré- quemment de public était une nécessité de sa pro- fession : il évitait ainsi de lasser ses auditeurs. D'ail- leurs, lorsqu'il avait acquis quelque réputation, on n'attendait pas qu'il lui prît fantaisie de venir, on l'appelait, comme on appelait le médecin, ou le devin, ou le charpentier*. Il était reçu dans les palais des princes, et il prenait part à leurs festins; la manière dont Phémios et Démodocos sont traités dans V Odyssée montre combien leur art était apprécié d'une aristo- cratie, qui goûtait de plus en plus les plaisirs élé- gants et délicats. Nous avons reproduit ailleurs en partie (p. 9G) la scène entre Ulysse et Démodocos; on se rappelle les paroles flatteuses du héros à l'égard des aèdes : « Tous les hommes qui habitent « sur la terre, dit-il, honorent et vénèrent les aèdes « à cause des récits que la Muse leur enseigne; car (( elle aime la race des aèdes*. » Cette haute estime tenait, comme on le voit, à l'idée partout répandue

��1. Odyss,y XVII, 382 et suiv., surlout 386: Outoi yàp xXtjto^ ye Ppoxûv et:* â;ce{pova yaîav.

2. Odyss., VIII, 479-481.

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