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508 CHAPITRE XI. — LES TRAVAUX ET LES JOURS

culières et d'une sagesse ancienne. Il est général et individuel en même temps: il révèle une civilisation et un homme ^.

La simplicité morale, voilà tout d'abord ce qui caractérise la poésie hésiodique; simplicité pro- fonde, populaire, vraiment touchante parce qu'elle ne songe pas à l'être. La conception fondamentale des choses y est toute religieuse et traditionnelle. La puissance divine est partout, et partout elle est sou- veraine; rien ne l'arrête ni ne déjoue ses volontés, mais elle, quand il lui platt, elle arrête et déjoue les calculs humains*. Au fond, ces idées ne sont pas dif- férentes de celles qui remplissent l'épopée homé- rique; mais, par l'aspect qu'elles prennent dans le poème des Travaux^ elles s'en écartent sensiblement. Les dieux d'Homère, révélés par le génie du poète, se montrent à nous ouvertement dans des descriptions que tout le monde connaît; ils parlent, ils agissent sous nos yeux, et ainsi, bien qu'environnés d'une splendeur immortelle, ils se rapprochent de l'hu- manité. Les dieux d'Hésiode, moins dramatiquement mis en scène, sont plus mystérieux, et par là mémo plus grands peut-être ; plus leurs formes restent indécises, plus ils sont propres à inspirer l'effroi. C'est à peine si en quelques passages d'un caractère presque anccdotique, comme par exemple dans le mythe de Prométhéc, on les voit réunis ets'occupant à une action déterminée. Partout ailleurs, ce sont des dieux cachés, mais qui surveillent tout avec une

��1. Nous ne pouvons que toucher ici légèrement aux idées mo- rales et religieuses d'Hésiode. Elles ont été exposées dans les premiers chapitres du livre déjà cité de M. Jules Girard, le Sen- timent religieux en Grèce.

2. Travaux, 105 : Odtoi; oj i{ ktj sjii Ato; voov cÇaX^aTOai.

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