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176 CHAPITRE IV. — POÉSIE lAMBIQUE

atteint d'emblée à la perfection grâce au génie d'Archi- loque, il décline presque aussitôt, et il ne remonte qu'une fois, avec Solon, jusqu'aux sommets de Tart, avant le moment où le drame s'en empare et le transforme.

Inventée en lonie, cultivée surtout par des Ioniens, la poésie iambique ne pouvait parler d'autre dialecte que celui de son pays d'origine. Le dialecte ionien des poètes iambiques n'est d'ailleurs ni celui d'Homère ni celui d'Hérodote : c'est un langage intermédiaire, plus strict et plus voisin de la prose que le premier, plus bref et plus énergique que le second, et en somme assez voisin du langage attique : ce qui est d'accord avec cette affir- mation des grammairiens grecs que l'ancien dialecte attique était peu différent de l'ionien du même tetnps. L'imitation d'Homère y est d'ailleurs sensible, comme dans toute la poésie grecque.

Pour le style, l'iambe prend tous les tons, depuis la familiarité souriante jusqu'à l'éloquence indignée, depuis la moquerie la plus grossière jusqu'à la Gertc la plus noble. Avant tout, il est libre, sincère, personnel. Tantôt le poète appelle les choses par leur nom, sans reculer devant le terme propre, peignant la réalité telle qu'elle est, ou telle que la passion la lui montre, avec les mots du langage journalier; tantôt la hardiesse de son vocabu- laire est extrême. Nulle part, le génie propre de l'écrivain ne se montre plus à découvert, en dehors de toute tradi- tion, dans sa vérité naïve et spontanée. Aucun genre ne soutient moins peut-être un poète médiocre; aucun ne permet davantage à un artiste de déployer au gré de son humeur ou de sa fantaisie la richesse de sa verve. C'est pour cela sans doute qu'il y a tant d'inégalité entre les différents noms que nous présente l'histoire de la poésie iambique.

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