Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t2.djvu/21

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De là aussi un dernier changement qui se rapporte à la langue. Le lyrisme innove en cela comme dans tout le resle. Il a son dialecte, ou plutôt ses dialectes; il a son style. C'est une poésie essentiellement locale, du moins au début. Ce n'est pas à dire que les poètes lyriques ne fussent de grands voyageurs et que les chants qu'ils composaient ne devinssent très vite, grâce à la communauté fondamentale du langage, comme le bien commun de toute la Grèce. Mais ces chants, bien que vite répandus, avaient cependant été composés d'abord pour un public plus restreint. Les fêtes que le lyrisme célèbre sont avant tout les fêtes de la cité. Les chœurs qu'il appelle au chant et à la danse sont formés de concitoyens du poète. Si c'est lui-même qui chante, c'est à des amis, à des convives, à un petit groupe particulier qu'il s'adresse. Le dialecte qu'il parle est par conséquent le dialecte même du pays où il vit, éolien à Lesbos, dorien à Sparte, ionien à Smyrne ou à Céos. La langue épique, locale aussi à l'origine, au temps des pre- miers récits héroïques d'où l'épopée devait sortir, avait Gnî, sous l'influence et à l'exemple de la grande épopée homérique, par revêtir exclusivement la couleur ionienne. Hésiode lui-même écrivait en ionien. La langue lyrique rompit cette sorte d'uniformité que le règne de l’épopée avait répandue par toute la Grèce; elle rendit aux dialectes locaux l'indépendance. Elle eut aussi dans le style une grande liberté. La vivacité des émotions, quelquefois leur nature personnelle, ailleurs Tenthousiasmo communiqué à l'imagination par l'appareil brillant de l'exécution mu- sicale, tout cela contribuait à exciter la hardiesse du poète, à l'affranchir des règles ordinaires, à lui donner une liberté singulière dans la création des tournures, des formes de style, des mots mêmes. — 11 convient pour- tant de faire deux réserves. D'abord, par une conséquence naturelle du grand rôle de l'épopée, le lyrisme emprunta

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