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340 CHAPITRE VI. — LYUISME CHORAL

de caractère que de talent : ce désaccord est trop commun pour qu'il y ait lieu peut-être de chercher une autre ex- plication.

Les anciens sont quelquefois allés plus loin : ils ont parlé non de sa légèreté sceptique, de la mobilité de son esprit et de ses sentiments, mais de sa vénalité. C'est là un trop gros mot, et qui no répond pas exactement à la réalité des choses. Mais ce qui a donné naissance à ce reproche, c'est un changement qui s'introduit en effet au temps de Simonide dans la condition des poètes lyriques. A en croire certains textes, les poètes lyriques antérieurs à Simonide chantaient pour le plaisir et l'honneur de chanter, par piété envers les dieux, par amitié pour les personnages qu'ils célébraient : c'est Simonide qui au- rait inventé de faire payer ses éloges et do les offrir contre espèces sonnantes à qui les lui demandait ^ Il aurait ainsi été une sorte de sophiste en son temps, c'est- à-dire un homme qui faisait de son art un métier lucratif et qui disait non ce qu'il croyait vrai, mais ce qu'il était obligé de dire ^ On racontait qu'Anaxilas de Rhégium lui offrant un jour un salaire médiocre, Simonide n'avait pas voulu chanter ses mules, victorieuses à la course, sous prétexte qu'elles avaient pour pères d'humbles ânes, mais que, le salaire proposé ayant grossi, le poète avait composé un hymne où il les appelait « (illes des cavales rapides ^ » Il y a dans tout cela du vrai et du faux. Nous ne savons pas exactement comment vivaient les poètes lyriques antérieurs à Simonide, mais on voit que beau- coup d'autres avant lui ont chanté pour des princes dont ils embellissaient les fôtcs; il n'est pas possible que ce

\. Cf. Schol. Pind., hthm. II. 5; Schol. Aristoph., Paix, 698; Gha- méléon, dans Athénée, XTV, 656, D; Plutarquo, Œuvres Morales^ p. 780, B.

± ()•>/ lx<ov, âXX* àvaYxa;/i|X£voç (Plalon, Prolag,, p. 346, B).

3. Fragm. 7 (dans \rislole, Rhél., III, 2; p. 1405, B, 23, Bekker).

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