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ORIGINES D£ LA PROSE 463

fois aussi des oracles (soit en vers, soit en prose) ou des iuterprétatioQS d'oracles, comme les célèbres pr^xpai de Delphes, qui romoalaient, disait-on, au temps de Ly- curgue, et qui, réglant la constitution Spartiate, étaient pieusement gardées dans les archives de la cité K L'habi- tude de noter les faits de ce genre était évidemment fort gé- nérale et fort ancienne^, bien que la présence de documents apocryphes donnftt souvent à ces archives un air d'anti- quité auquel elles n'avaient pas droit. Mais tout cela n*est pas de la littérature. Les Fastes de la Rome primi- tive, les Commentaires des Pontifes, les Annales mômes, n en sont pas davantage. Tant que la prose ne sert qu'à rédiger un document, à noter un fait au moment même où il se produit, elle n*est qu'une sorte d'outil néces- saire à la vie de chaque jour. Ce qui constitue la littéra- ture, c'est de répondre plutôt à une curiosité spéculative de l'esprit qu'à un besoin pratique et immédiat. La lit- térature historique ne commence qu'au moment où le dépôt d'archives suscite le livre d'histoire. De même, il n'existe une littérature scientiGque ou philosophique qu'à partir du jour où un homme, après avoir longtemps fait sur la nature des observations ou des réflexions immé- diatement applicables aux nécessités de la vie, se met à en considérer les résultats d'un point de vue spéculatif et forme de ces matériaux un livre.

L'apparition de cette chose nouvelle, le livre d'hisloire ou de philosophie, suppose une transformation profonde des esprits. Jusque-là, en dehors des besoins immédiats de la vie pratique, l'esprit n'avait de curiosité pour les faits que s'ils touchaient la sensibilité ou l'imagination.

1. Plutarquo, Lycurgue, c. 6, 1-2; Oracle de la Pythie, c. 19.

2. Cf. Polybe, XII, 11 (12), 1 ; Denys d'Halicarnasse, Jugement sur Thucydide t c. 5; Plutarque, Agésilns, 19; Soion, Il ; De Mus., 3; Ta- cite, Annales, IV, 43; Athénée, XIV, p. 635, Ë; Pausanias, Y, 4, 4, et 8, 3 ; etc.

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