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LES RAGES ET LES ÉCOLES 481

est alors aussi serré, mais aussi vide de réalité, qu'un raisonaement mathématique. Au milieu de ces tentati- ves, la pensée cependant se fortifie et s'assouplit ; la prose acquiert peu à peu le sentiment des qualités dia- lectiques et vigoureuses qu'elle déploiera dans la période attique.

Chose singulière, dans l'incertitude qui règne encore sur la séparation exacte des deux domaines de la prose et de la poésie, ce ne sont pas les systèmes des physio- logues, plus attachés à la réalité sensible, qui s'expriment dans le langage de la sensibilité et de Timagination. C'est Xénophane d*abord, ensuite Parménide.. qui exposent en vers la doctrine de TUn, comme si la vivacité de leur enthousiasme était une compensation sufGsante au carac- tère abstrait de leur système. Empédocle les suit, mais avec plus d'adresse et moins de naïve ardeur métaphy- sique.

Dans cette floraison de systèmes, ce sont d'abord les Ioniens d'Asie-Mineure, ensuite les Doriens de la Grande- Grèce et de la Sicile qui tiennent le premier rang : mais ceux-ci même ont des Ioniens pour guides, car Xéno- phane est de Colophon et Pythagore est de Samos. Les Doriens du Péloponnèse et les Éoliens ne seront jamais do grands philosophes. Quant aux Attiques, leur heure ne doit venir qu'avec Socrate. Chacune des races grec- ques, en somme, reste fidèle à son caractère. L'Ionie, qui a créé l'épopée, crée aussi la science : elle est à Ta- vant-garde en toute spéculation. La Grande-Grèce et la Sicile sont de race mélangée et active. Les Doriens purs vivent plus qu'ils ne rêvent. Les Éoliens en sont restés à la chanson. Athènes, enfin, recueille les inventions des autres races, les mûrit et les fait servir à la connaissance du monde moral.

Nous venons d'indiquer à grands traits les caractères essentiels de la philosophie grecque dan» cette première

Hist. do la Litt. grecque. — T« II» 31

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