GÉOGRAPHIE DES DIVERS GENRES 47
Les trois principales races grecques ont leur rôle dis- tinct dans la formation du lyrisme. L'iouie, qui accueille l'art de l'Asie et en particulier la flûte phrygienne, in- vente l'élégie et Tiambe. L'éolienne Lesbos, qui produit à la fois Terpandre, Arion, Alcée, Sappho, est la patrie des citharèdes. La dorienne Laccdémone n'invente rien, mais, par sa vie politique et religieuse, elle développe si bien les germes apportés du dehors que ceux-ci, jus- que-là peu féconds, y produisent des fruits tout nou- veaux, et que le Péloponnèse, grâce à elle, semble d'a- bord la patrie privilégiée de la poésie chorale.
Peu à peu, cependant, les genres se mêlent un peu partout. Quel qu'ail élé le lieu de naissance de chacun d'eux, il devient promptement une partie du patrimoine commun de toute la race hellénique. On chante partout des nomes, des péans, des hyporchèmes ; Ioniens et Doriens cultivent l'élégie à tour de rôle ; la chanson de table fait le tour du monde grec. Les pèlerinages célè- bres, comme celui de Délos, les grands jeux nationaux, avec leurs fêtes musicales et lyriques, rendent les échan- ges incessants.
De même, un poète ne s'enferme pas toujours stricte- ment dans un genre déterminé. Un élégiaque fait des iambes ; un poète de chansons fait des hymnes.
Et cependant toute distinction ne disparaît pas pour cela entre le génie des diverses races grecques, non plus qu'entre les aptitudes des individus. L'élégie n'est pas traitée de la même manière en lonie et chez les Doriens. Tel poète, qui a pratiqué différents genres, reste cepen- dant, aux yeux de la postérité, le représentant par ex- cellence d'un seul d'entre eux : Solon, malgré ses iambes, est avant tout un élégiaque; Pindare lui-même, malgré la variété de ses chants lyriques, était déjà dans l'antiquité le poète incomparable des épinicies. En étudiant chaque poète, nous le laisserons à la place que lui assigne le
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