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59i CHAPITRE X. — HÉRODOTE

lieu de s'en fier uniquement à la Gnesse de ses sens. Ce qui manque souvent à Hérodote, par la faute do son temps plus que par la sienne, c'est justement cette sorte de « montre ».

Nous avons déjà dit qu'il ignore l'égyptien, Tassyricn, même le perse. S'il s'aventure parfois à citer quelque mot d'une de ces langues, il est clair qu'il se borne à répéter tant bien que mal l'interprétation qu'un drog- man lui a donnée K II ne peut lire un document original ni contrôler ce qu'on lui en dit. Les documents grecs lui tendent des pièges d'un autre genre. S'il rencontre à Thèbes, en Béotie, des inscriptions attribuées à Am- phitryon ou à quelque contemporain de Laïus, il ne fait nulle difficulté de les accepter comme authentiques -.

En fait de sciences naturelles, il sait ce qu'un homme de son temps pouvait savoir, c'est-à-dire fort peu de chose.

Même en matière de psychologie et de morale, son ex- périence est courte. En dehors de certaines différences extérieures et simples entre le Grec et le Barbare, entre le Perse et le Scythe, entre l'Égyptien et le Thrace, il n'imagine guère qu'une sorte d'âme, celle qu'il rencon- tre dans la Grèce de son temps ; ce type unique est seu- lement diversifié par des différences individuelles. Il n'a qu'une idée très vague de l'état d'esprit d'un roi d'E- gypte, d'un roi d'Assyrie, ou même d'un roi de Lydie tel que Crésus. Comme il n'a pas d'accès aux sources origi- nales, nul document authentique ne lui transmet Tim- prcssion vive de ces choses éloignées. Il n'a pas davan- tage une notion claire de l'état d'esprit d'un drogmao, d'un ciccrone, d'un sacristain qui montre et explique son temple, d'un vieux soldat qui raconte la bataille où il s'est trouvé. Il ne sait pas toujours traduire et transposer

1. Voir par exemple, IT, 143 (le mot 7cipw|jLi;).

2. V. 59-61.

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