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LA LANGUE ATTIQUE 21

tes une foule de ressources, dont la variété même exci- tait Tesprit. L'usage y établissait des distinctions fines entre les mots, et ces distinctions, bientôt familières à tous, aiguisaient la pensée, en la provoquant à en cher- cher d'autres. Un des charmes de la langue attique, c'é- tait remploi qu'elle aimait à faire dés termes atténués ^ Tantôt elle y mettait une ironie gracieuse, tantôt une nuance délicate de sentiment, tantôt une discrétion spiri- tuelle, qui aimait mieux laisser deviner en partie les cho- ses que de les dire. Mais, par un contraste remarquable, cette langue, si propre aux sous-entendus, abondait aussi en expressions vives et franches, qu'elle employait à propos. Ce qui nous en donne le mieux l'idée, ce sont les comédies d'Aristophane et certaines parties des dialo- gues de Platon. On est charmé, en les lisant, d'y prendre sur le fait la conversation athénienne avec toute sa vi- vacité, sa grâce, son enjouement, et cette sorte de préci- sion dramatique qui fait sentir les plus fines variétés d'humeur ou de caractère comme les plus légers mouve- ments de la passion.

La langue écrite différait nécessairement, à Athènes comme partout, de la langue parlée ; et elle en différait plus ou moins, selon les genres. Nous insisterons ailleurs sur ces différences. Ce qu'il faut dire immédiatement, c'est que, là même où l'écart est le plus sensible, la langue écrite ne cesse pas de s'inspirer de la langue parlée. C'est celle-ci qui a été par excellence l'école des écrivains at- tiques, qui a fait dès l'enfance leur éducation, qui a tracé dans leur esprit ce qu'on pourrait appeler les routes de la pensée, et qui par suite les a marqués de son empreinte.

��1. Notons, un peu au hasard, les affirmations négatives (oûx a^^apcc, où Tcavu. où-/ fjXKTTa), les futurs atténués (oùx av àuéXOoiii', àXXà -ah^bi TTjv Oupav. Arist., Acharn. 403), etc. Au reste, il suflit do lire vingt vers de suite d'une comédie d'Aristophane pour rencontrer maint exemple à l'appui de ces observations.

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