Aller au contenu

Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/365

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

REMARQUES GÉNÉRALES 353

grec. Non seulement en effet ils ont eu des successeurs, dont les noms figurent souvent à côté des leurs dans la Poétique d'Aristote, mais, de leur vivant même, ils ont dû lutter dans les concours publics avec des concur- rents nombreux, qui leur furent bien des fois préférés. A distance, ils nous semblent isolés; et, ne voyant plus qu'eux, nous imaginons involontairement que leurs ri- vaux no comptaient pas. Mais il faut bien dire que ces grandes supériorités ne sont jamais aussi incontestables qu'elles le paraissent. Le temps exagère les avantages de ceux qui ont conquis l'immortalité et déprécie à l'ex- cès ceux à qui elle a échappé. L'histoire a pour tache de réparer en partie cette injustice, et, tout en tenant compte des victoires définitives et des oublis irréparables, elle doit s'efforcer de ressusciter le spectacle tumultueux et complexe de la vie, en dehors duquel il serait malaisé de saisir les proportions véritables des hommes et des choses. Ceux qu'Athènes a mis parfois au dessus des maîtres que nous admirons n'ont guère pu ne pas justi- fier par certains mérites un jugement si glorieux. Es- sayons de voir s'il est encore possible d'en deviner au moins quelque chose.

Ce qui nous reste d'eux n'est presque rien; ce que les témoignages nous en apprennent est souvent incertain et toujours insuffisant. Dans ces conditions, nous ne devons pas songer à les étudier Tun après l'autre. Quand les hommes sont si mal connus, ce sont les faits principaux qui attirent seuls l'attention. Mais ceux-ci même ne peu- vent plus être présentés d'une façon complète ni analysés dans tous leurs rapports mutuels. Partout des doutes, des lacunes, une connaissance comme rompue et inter- mittente. Plus que jamais, il faut ici se résoudre à se- couer l'insignifiance des petites choses, pour découvrir celles qui ont de l'intérêt.

Un premier fait digne de remarque, c'est le nom-

Hist. delà Litt. grecque. — T. III. 23

�� �