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Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t3.djvu/448

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436 CHAPITRE X. — ORIGINES DE LA COMÉDIE

espionner les Troyens chez eux et il exposait ainsi aux spectateurs ce qu'il allait faire :

« Prêt à partir, je vais m'asseoir ici un instant et je dirai ce que je compte faire ; les gens avisés me comprendront. Car certes, j'estime que mon souhait est tout à fait selon la nature et le bon sens, pour peu qu'on veuille voir ce qui est vrai. Puissé-je arriver là où l'on m'a commandé d'aller ! puissé-je ensuite réussir plutôt qu'honorer mon insuccès en mourant 1 Que je me tire de cette dangereuse entreprise et que j'obtienne une gloire divine en pénétrant dans la ville des Troyens 1 Puis, qu'informé clairement de toutes choses, je revienne tout révéler aux divins Achéens et au cher fils d'A- trée, et que je sorte de là sain et sauf *. »

D'autres fois, le poète parlait de lui-même et en son propre nom. On a vu plus haut deux vers, probable- ment empruntés à un prologue de ce genre, où il oppo- sait sa manière à celle de ses prédécesseurs, et notam- ment d'Aristoxène. Dans un autre morceau, qui consiste en cinq tétramètres trochaïques, Epicharme, pleinement conscient de la force et de la nouveauté de quelques-unes de ses pensées, déclare fièrement qu'on en conservera le souvenir et qu'un jour il se trouvera quelqu'un pour les dépouiller du mètre de la comédie et les revêtir de vêtements de pourpre^. De tels morceaux établissent, d'une manière .à peu près certaine, Texistence de prologues

4. Ce fragment, retrouvé sur un papyrus égyptien, a été publié pour la prcniiore fois par M. Gomperz en 1889, avec d'autres frag- ments divers provenant do la collection de papyrus de l'archiduc liégnier. !M. Blass l'a commenté et corrigé dans les Jahrbûcher fur classische Philologie, 1889, p. 257. Je traduis ici d'après le texte qu'il a établi. Le morceau est composé de dix tétramètres trochaïques.

2. Diogéne Laorce, 111, 17. Je ne vois aucune raison pour douter de l'authenticité de ces vers. Ce qui les rend suspects, c'est qu'on a voulu y voir une allusion à Platon s'appropriant les doctrines d*Épi- charme (voyez plus loin). Mais Kpicliarme a bien pu dire cela dans un sens général. Ceux qui fabriquent après coup des allusions les font d'ordinaire plus précises.

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