SON ESPRIT 457
tense et plus libre. Un dieu Taime, la protège, l'encou- rage, Tégaye, et elle le sait; elle a elle-même quelque chose de divin ; elle est une des formes de l'inspiration. Sa fantaisie est vive, hardie, folâtre et charmante. Elle raisonne avec cette subtilité abondante qui est propre- ment grecque; mais le raisonnement ne la retient pas : elle se moque de la logique aussi joliment qu'elle en use. Elle crée des êtres sans consistance, des actions sans suite, des paroles sans liaison ; mais ces extrava- gances ont de la force et de la saveur, ces êtres incohé- rents sont vivants et amusants, et, chose curieuse, ce dé- sordre n'est point confus. Là est peut-être son caractère le plus distinctif. La clarté native de Tes^pritattique perce à travers la folie dionysiaque et Tillumino tout entière. Rien de nuageux ni d'épais : la raison ne dort pas dans celte ivresse comme dans une sorte de nuit, elle s'y joue plutôt dans une atmosphère brillante, s'élançant où il lui plaît, libre, capricieuse, avec une grâce incompa- rable.
N'attendons pas de la comédie grecque, tant qu'elle sera possédée de ce délire, une étude sérieuse de la vie. Dédaignant la vraisemblance, elle est impropre à pein- dre les mœurs. Elle ne sait point représenter les hommes tels qu'ils sont. Le simple ridicule ne lui suffit pas; il faut qu'elle le pousse jusqu'à la charge. L'exagération folle, la fantaisie à outrance, voilà son élément. Toute- fois, ce qui fait sa valeur morale, c'est que, sous cette fantaisie, on aperçoit clairement un fond de vérité.
La comédie rustique, le comos des Dionysies champê- tres, n'était qu'une forme bachique de Tiambe. Elle s'attaquait aux hommes et aux choses, la verve et l'inso- lence satirique lui étant aussi naturelles que la gaieté. Plus elle s^était perfectionnée, plus cette tendance primi- tive s'était accusée. Nous avons cité le proverbe relatif à Myllos : comme lui, la comédie avait l'oreille fine et
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