606 CHAPITRE XIII. — LA COMÉDIE AU IV» SIÈCLE
mais ils les énonçaient, sous rinfluence de l'heure pré- sente, en aperçus vifs, ingénieux, changeants, se con- tredisant eux-mêmes au besoin avec cette assurance naïve qui est la vérité même. C'est ainsi qu'une variété pleine d'intérêt éclatait partout dans la représentation de ces mœurs, en apparence identiques. Les pères indulgents et les pères sévères, ceux qu'on trompe et ceux qui se lais- sent tromper, étaient bien au fond toujours les mêmes^ si Ton veut; mais, dans la manière de motiver cette in- dulgence ou cette sévérité, dans les degrés et les phases de Tune ou de l'autre, que de différences délicates, amu- santes, et d'une Une vérité, selon la condition sociale de chacun, selon son caractère et selon les circonstances de l'action !
Ne faisons pas d'ailleurs cette comédie plus sérieuse qu'elle n'était. Si elle n'excitait pas le rire bruyant et tu- multueux de l'ancienne comédie, ce n'est pas à dire pour cela qu'elle eût renoncé à amuser. Elle était plai- sante, non comme une farce, mais comme la vie elle- même Test parfois. Elle l'était surtout par les déceptions des gens trop conflants, par les catastrophes ridicules des sots et par les inventions souvent déjouées des trom- peurs. Elle avait en outre, comme un héritage de la co- médie moyenne, ses personnages attitrés pour faire rire: le parasite, le soldat fanfaron, surtout l'esclave intrigant, qui dupait les vieillards, au profit des jeunes gens. Ce dernier était vraiment plaisant par son audace, sa pré- sence d'esprit, son adresse à feindre, ses inventions iné- puisables. Il a donné naissance à la longue lignée des Scapins S auxquels il est resté supérieur: ceux-ci sont devenus des repris de justice et de vrais bandits; lui n'é- tait qu'un polisson sans scrupule, qui avait les vices de son état, mais avec les excuses qu'il comportait, et à qui
1. Voir Marc Monnier, Les Ancêtres de Figaro.
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