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658 CHAPITRE XIV. — POÉSIE HORS DU THÉÂTRE

qu’il trouvait en faute, mais sans amertume et avec une grâce spirituelle qui lui faisait pardonner sa franchise K Les fragments de ses poésies répondent bien à l’idée que les témoignages anciens nous donnent de lui -. C^est de la morale sévère et gaie tout à la fois, de l’ascétisme en belle humeur. De ses ïambes il nous reste en tout dix- huit vers. Les plus curieux sont trois trimètres, de ceux qu’on appelait boueux (ywXoî), empruntés à une série de préceptes ironiques qu’il avait intitulée YEphéméride :

« Compte à ton cuisinier dix mines (environ dOOO francs); à ton médecin, une drachme (\ franc); au flatteur, cinq talents (25,000 francs); au conseiller, un peu de fumée; aux filles, un talent (5000 francs); au philosophe, trois oboles (0 fr. 45) 3. »

Relativement à l’amour, voici ses conseils :

« Il y a un remède à l’amour, c’est la faim ; si elle ne suffit pas, le temps. Si ta ilainme résiste à l’un et à l’autre, en der- nier recours accroche au mur une corde, pour te pendre *. »

Ses Elégies ressemblaient fort à ses ïambes pour le ton. L’une d’elles, dont Tempereur Julien nous a conservé onze vers ’^j était une parodie d’une des plus célèbres élégies de Solon, Cratès suivait son modèle vers par vers, quelquoTois sans y rien changer, plus souvent en l’ap- propriant à ses idées et en lui prêtant sa rude et cynique franchise :

« Brillantes filles de Mnémosyné et de Zeus Olympien, Muses de Piérie, prêtez l’oreille à ma prière. Donnez toujours la pâture à mon estomac, qui, de jour en jour, sans m’as-

1. Julien, Discours, VI, p. 201 : ’EireTifia SI oO (lexà ictxp^ac, àXXà (teTà -/aptTo;.

2. Voy. Borgk, Poet. lyr. gi\, II, p. 364 et Mûllach-Didot, Fragm. philos, (jraecor., II, p. 333.

3. Diof,’. Laërce, VI, 86. Fr. 15 Bergk.

4. Anthol. palat., IX, 497. Fr. 17 Bergk.

5. Julien, Discours, VI, 199 c. Fr. 1 Bergk.