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récit forme le huitième. Cette division en huit livres ne remonte évidemment pas à Thucydide lui-même. Marcellin, Diodore, le scoliaste, disent expressément qu’il y avait plusieurs manières de couper en livres l’ouvrage de Thucydide : les uns en distinguaient huit, les autres neuf, d’autres encore treize[1]. Tous ces systèmes de division dataient probablement de l’époque alexandrine et se fondaient sur des raisons purement littéraires ou de commodité pratique. À ce point de vue, celui de nos manuscrits et de nos éditions n’est pas mauvais, sauf pour le cinquième livre, formé en réalité, comme on vient de le voir, de deux parties tout à fait disparates. Quoi qu’il en soit, ce système n’a pas plus d’autorité que n’en avaient les autres, et ne saurait par lui-même nous renseigner sur les problèmes qu’une critique attentive a soulevés relativement aux origines et à l’état actuel de l’ouvrage de Thucydide.

Ces problèmes sont de différentes sortes et d’intérêt fort inégal. Citons seulement pour mémoire l’opinion de ces critiques de l’antiquité qui considéraient le huitième livre comme apocryphe et l’attribuaient soit à la fille de Thucydide, soit à Xénophon, soit à Théopompe[2]. Cette opinion, qu’expliquent en partie les traditions de l’antiquité sur le rôle joué par ces personnages dans la publication ou la continuation de l’histoire de Thucydide, ne pouvait naître, malgré tout, que dans une assez pauvre cervelle. La marque de Thucydide se reconnaît, dans le huitième livre comme dans les autres, à toutes les pages.

Une opinion beaucoup plus spécieuse et plus vraisemblable, c’est celle qui croit trouver dans le huitième livre les traces d’une rédaction moins achevée que dans les premiers. Cette opinion remonte aussi à l’an-

  1. Marcellin, 58 ; Diodore, XIII, 42, 5 ; Schol. Thucyd., IV, 135, 2.
  2. Marcellin, 43.