Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t4.djvu/26

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citoyen qui avait une affaire en justice plaidât lui-même sa propre cause. Athènes ne connaissait pas les avocats. Bien entendu, les moins habiles ou les plus timides faisaient écrire d’avance leur plaidoyer par un homme de l’art qu’on appelait un logographe mais les logographes avaient pour premier devoir de s’effacer ; ils visaient moins à briller qu’à être naturels ; leur triomphe était d’être si simples qu’on ne reconnût pas leur art ; ils devaient parler comme tout le monde en parlant mieux que tout le monde ; il fallait qu’en entendant réciter leur œuvre chacun pût se croire en état d’en faire autant et que fort peu en fussent capables, ce qui est, selon Pascal, le comble de l’art. Quelquefois, cependant, on se faisait assister d’un prétendu ami (συνήγορος σύνδικος), qui parlait en second et jouait le rôle d’un véritable avocat. Mais, dans ce cas encore, cet orateur devait parler en ami plutôt, qu’en avocat, sous peine d’éveiller la défiance ; cela ne veut pas dire qu’il dut être sincère ou modéré, (on insultait ses adversaires et on mentait à Athènes comme ailleurs), mais cela veut dire qu’il devait parler avec une simplicité de bon goût. — Enfin n’oublions pas la clepsydre, qui forçait à être bref, c’est-à-dire à ne pas ennuyer les auditeurs, à choisir les arguments, à resserrer les explications, en un mot à faire œuvre d’artiste et d’homme de goût. Art et goût, ces deux mots reviennent toujours à propos de l’éloquence des logographes.

Une troisième sorte d’éloquence est celle du genre épidictique, destiné à tenir plus tard une place assez brillante dans la littérature attique. Au Ve siècle, du moins avant l’apparition de la rhétorique proprement dite, il ne semble pas que ce genre eût beaucoup de vie. Ce n'est pas que les occasions où il aurait pu se produire fussent rares ; il ne manquait pas de circonstances, dans la vie athénienne, où il fallait qu’une voix