Si nous avons commencé l’étude des œuvres alexandrines par celle de tant d’écrits en prose où l’érudition la plus curieuse, mais parfois la plus sèche, s’exprimait en un style incolore, c’est que cette érudition laborieuse est vraiment le caractère essentiel de l’époque et que la poésie même en subit l’influence. Les poètes de ce temps ne sont plus, comme jadis en Grèce, les disciples inspirés d’une tradition ancienne et toujours vivante, chantant pour le peuple, dans des fêtes animées de l’esprit du peuple, en relation étroite avec la vie même de la nation. Il n’y a plus de nation, plus de cité proprement dite : il n’y a plus de peuple qui vive d’une vie à la fois littéraire et morale dans l’enceinte de la cité. Il n’y a que des individus, dont l’immense majorité s’absorbe dans la vie matérielle de chaque jour, traversée parfois de rêves sensuels ou mystiques, tandis qu’une petite élite relit les vieux chefs-d’œuvre. Les poètes écrivent pour cette élite, quelques-uns sont eux-mêmes