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ATHÈNES

et l’éclat s’en sont retirés : il n’y a plus d’affaires politiques, plus de ces causes bruyantes qui étaient l’épilogue ordinaire des luttes de la tribune aux harangues ; et quant aux affaires civiles, après un siècle de rhétorique et d’exemples oratoires, c’est un métier plus qu’un art de les plaider ; beaucoup sans doute y réussissent, mais on ne sait plus leurs noms, qui n’intéressent que leurs clients. L’éloquence d’apparat, enfin, ne peut guère, après Isocrate, faire autre chose que se répéter ; tous les secrets du bien dire sont connus ; ils le sont même trop : on ne peut plus, dans cette voie, frapper beaucoup les imaginations ; la rhétorique va devenir affaire d’école et instrument d’éducation plus encore qu’objet d’art et de pratique solennelle. Voilà donc bien des genres qui meurent ou qui déclinent. Que reste-t-il ? Il reste d’abord, en poésie, la comédie, mais la comédie dite « nouvelle », celle de Ménandre ; comédie de mœurs privées, de fine observation psychologique, de morale facile, fidèle image de cette société polie et spirituelle[1] ; ensuite certains genres secondaires, parfois satiriques, comme les Silles de Timon. Il reste surtout deux grandes voies ouvertes à l’activité intellectuelle et où la foule des esprits se précipite avec une ardeur incroyable : l’une est celle du savoir proprement dit, sous ses formes diverses, histoire du passé, connaissance des choses naturelles, étude et recherche de tous les faits positifs de tout ordre ; l’autre est celle de la spéculation philosophique et morale qui s’attache à régler la vie humaine. La science de la nature et la philosophie avaient été jadis une seule et même chose ; elles tendent maintenant à se séparer, à mesure qu’il entre dans la science de la nature plus de recherche positive et d’érudition, et, dans la philosophie,

  1. Cette comédie a été étudiée précédemment, au tome III, à cause des liens étroits qui la rattachent à la comédie antérieure.