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CALLIMAQUE

des récits de légendes curieuses (comme celle d’Érichthonios) introduites dans les entretiens mêmes et formant épisodes. Ce poème nous était fort mal connu, lorsque, en 1893, le déchiffrement d’une tablette en bois nous en a rendu cinquante vers nouveaux, accompagnés d’indications qui ont permis d’évaluer avec vraisemblance la longueur approximative de l’ouvrage[1].

Les premiers vers des nouveaux fragments semblent contenir une conversation entre Hécalé et la corneille qui avait trahi le mystère de la naissance d’Érichthonios. On voit, à la fin de ce passage, pourquoi les corbeaux aujourd’hui sont noirs, tandis qu’ils étaient blancs à l’origine. L’auteur des (Αἰτία) se trahit ici d’une manière frappante. Les vers qui suivent sont les plus jolis de ceux qu’on a retrouvés ; un voisin, tout glacé par le froid du matin, vient réveiller Hécalé, qui s’est endormie en causant :

Allons, les mains des voleurs ne sont plus en chasse ; voici que brillent les lampes matinales ; le porteur d’eau chante son refrain ; la maison voisine de la route s’éveille au bruit de l’essieu qui crie sous le chariot, et les forgerons nous assomment en s’assourdissant eux-mêmes.

Tout cela est fort joli, mais combien éloigné de l’épopée proprement dite ! On comprend qu’Apollonios et Callimaque ne pussent pas s’entendre. Le poème se terminait par le retour triomphal de Thésée, retour dont le poète nous décrit encore avec une précision érudite certains détails qui devaient avoir une valeur rituelle, et par la mort d’Hécalé[2], qui n’a d’ailleurs laissé aucune

  1. Voy. l’article de Th. Reinach, Revue des Études grecques, 1893, p. 258-266, où les fragments de l’Hécalé sont donnés et traduits. — Sur l’ensemble de l’Hécalé, l’étude de M. Couat (p. 358-381), bien qu’antérieure aux dernières découvertes, est toujours à lire.
  2. Cf. Couat, p. 387.