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CHAPITRE IV. — LA POÉSIE ALEXANDRINE

trace dans le fragment nouveau. Une épigramme de Crinagoras, dans l’Anthologie[1], montre l’estime que les connaisseurs faisaient de l’Hécalé : il est probable que c’était en effet du meilleur Callimaque.


On peut en dire autant des épigrammes qui nous restent sous son nom. Elles n’ont pas seulement l’élégance ordinaire à ce genre de composition ; elles ont du tour et du trait, elles sont vives et spirituelles. Les qualités de Callimaque, si elles n’étaient pas de celles qu’on est en droit d’attendre de qui aborde les grands sujets, convenaient au contraire merveilleusement à de petites pièces de circonstance, où la poésie proprement dite n’est pas indispensable.


La gloire de Callimaque, quoique fort grande de son vivant, eut des adversaires, nous l’avons vu[2]. Au total, c’est l’admiration qui domine. Catulle a traduit un de ses poèmes ; Ovide l’a beaucoup imité ; Properce l’invoque avec Philétas[3]. Quintilien le met encore au premier rang des élégiaques[4]. Cependant l’opinion contraire avait aussi des défenseurs. Un poète de date inconnue, Antiphane, a écrit sur lui et sur son école, sur cette race maudite de grammairiens qui rongent les grandes œuvres et ne goûtent qu’Érinna, une épigramme mordante qui n’est pas sans vérité[5]. Martial lui reproche de n’être qu’un érudit, à qui manque la saveur de la pure humanité[6]. La juste mesure se trouve peut-être dans le

  1. IX, 545.
  2. V. plus haut, p. 211.
  3. V. plus haut, p. 163. Ailleurs, il est vrai, il l’appelle inflatus III, 34, 32 : inflati somnia Callimachi).
  4. Quintilien, X, 4, 58.
  5. Anthol. Pal. XI, 322. Cf. ibid., 321 (épigr. de Philippe) et 29 (épigr. d’Antipater de Thessalonique).
  6. Martial, X, 4, 9-12.