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HISTOIRE PRAGMATIQUE

derniers, nous n’avons plus que des fragments d’importance et d’étendue fort inégales, dont les plus considérables proviennent d’une compilation faite au xe siècle par Constantin Porphyrogénète[1].

On s’est souvent demandé à quel moment de sa vie Polybe avait conçu la première idée de son histoire et s’il l’avait publiée en une ou en plusieurs fois[2]. Il est clair que la période de cinquante-trois ans qui finit en 168, par la défaite de Persée, est pour lui la période décisive. Il est donc permis d’en conclure qu’il conçut l’idée de son ouvrage peu après son arrivée à Rome, et que le récit des vingt-deux années suivantes lui fut suggéré après coup par la marche ultérieure des événements. D’autres indices particuliers conduisent d’ailleurs à la même conclusion[3]. Il est possible aussi que Polybe n’ait pas attendu l’achèvement complet de son ouvrage pour en offrir certaines parties à la curiosité de ses contemporains. Mais il est certain qu’il le publia lui-même sous sa forme définitive, car on trouve, jusque dans les premiers livres, des allusions précises aux quarante livres qui en formèrent l’étendue totale[4]. Prenons-le donc comme un tout, et essayons d’en dégager la physionomie de Polybe historien.

III

Ce qui le distingue profondément de tant d’autres de ses prédécesseurs ou de ses contemporains, simplement érudits et curieux, ou éloquents, c’est d’avoir voulu faire une histoire pragmatique, c’est-à-dire tournée tout

  1. V. la Bibliographie en tête du chapitre.
  2. Hartstein, Ueber die Abfassungzeit der Geschichte des Polybios, Philologus, XLV, 1886. Cf. Susemihl, I, p. 407-408.
  3. Cf. Werner, De Polybi vita et itineribus, Leipzig, 1877 (p. 31-41).
  4. Polybe, III, 32, 2.