Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/317

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
299
HIPPARQUE

Strabon, par Pline, surtout par Ptolémée. Les savants modernes sont émerveillés de la hardiesse de ses entreprises, de la sûreté fréquente de sa méthode, de la grandeur des résultats qu’il obtint avec des ressources si faibles[1]. Il est astronome, mathématicien, géographe. En astronomie, s’il eut le tort de continuer, après Aristarque de Samos, à mettre la terre au centre du monde, il fit d’admirables recherches sur la marche du soleil et de la lune, et essaya d’en calculer la distance à la terre : pour la lune, ses calculs sont presque entièrement exacts. Il découvrit la précession des équinoxes et commença sur les étoiles fixes des études étonnamment précises et fécondes. En mathématiques, il invente la trigonométrie. En géographie, il proclame la nécessité de s’appuyer avant tout sur le calcul des longitudes et des latitudes et essaie de donner à la cartographie une méthode plus rigoureuse[2]. Rien de tout cela, à vrai dire, ne relève proprement de la littérature, il n’est cependant pas inutile, pour apprécier l’esprit alexandrin, de songer qu’il a pu produire un Hipparque à côté d’un Archimède. Car ces grands noms sont bien exclusivement alexandrins : ils expriment en perfection l’épanouissement de cet esprit dans ce qu’il a de plus noble et de plus hardi. Il y avait là une sève qui, pour se détourner de la littérature, n’en était pas moins singulièrement forte et féconde encore. Après eux, la période des grandes découvertes scientifiques est close : on commentera les hommes de génie, on fera des applications de leurs théories, mais on ne retrouvera plus de longtemps cette vigueur originale[3].

  1. Cf. C. Manitz, p. 283. V. aussi Susemihl, I, 765-774.
  2. Cf. Marcel Dubois, Examen de la géogr. de Strabon, p. 302-312.
  3. Mentionnons pour mémoire le mathématicien Geminos, de Rhodes, qui vivait au début du ier siècle, et dont il nous reste une Introduction aux Phénomènes d’Aratos (publiée par Petau, Uranologion, Paris, 1630).