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CHAPITRE II. — D’AUGUSTE À DOMITIEN

τῶν δέκα ῥητόρων), il avait dû essayer de noter avec précision, selon la méthode que nous avons vue appliquée aussi par Denys, les caractères distinctifs de chacun d’eux[1]. Dans un autre, plus synthétique, il essayait de dégager la définition même de l’atticisme, et il opposait l’éloquence attique à l’éloquence asiatique (Τίνι διαφέρει ὁ ἀττικὸς ζῆλος τοῦ Ἀσιανοῦ). Peut-être, suivant une ingénieuse conjecture, était-ce là encore le sujet de son écrit contre les Phrygiens (Κατὰ Φρυγῶν), où il aurait donné à sa doctrine la forme d’une sorte d’invective contre les orateurs de l’Asie[2].

Démosthène devait naturellement tenir sa place dans ces écrits. Mais, de plus, Cécilius lui avait consacré plusieurs études spéciales. L’une avait pour objet de discerner, entre les discours qui portaient son nom, ceux qui étaient authentiques et ceux qui ne l’étaient pas (Περὶ Δημοσθένους, ποῖοι αὐτοῦ γνήσιοι λόγοι καὶ ποῖοι νόθοι). Une autre était une comparaison développée entre lui et Eschine, considérés comme les deux princes de l’éloquence attique (Σύγκρισις Δημοσθένους καὶ Αἰσχίνου). Enfin, dans une autre encore, Cécilius, par une initiative digne d’être notée chez un Grec, n’avait pas hésité à toucher à la littérature latine, en comparant le maitre de l’éloquence grecque au maître de l’éloquence romaine, Démosthène à Cicéron (Σύγκρισις Δημοσθένους καὶ Κικέρωνος). Il est vrai que cette tentative est jugée sévèrement par Plutarque, qui laisse entendre que Cécilius en cela avait mal mesuré ses forces[3]. Quoi qu’il en soit, l’idée même de cette comparaison impliquait à tout le moins une li-

  1. Il nous reste de cet ouvrage un fragment sur Antiphon, cité par Photius, Bibl. cod. 259. Les références de Photius montrent que Cécilius, dans cet écrit, avait joint une biographie sommaire à son étude sur chaque orateur. C’est ce que faisait aussi Denys.
  2. Voy. C. Müller, Fr. H. gr., III, p. 331.
  3. Plut., Vie de Dém., ch. iii : Ἐνεανιεύσατο σύγκρισιν τοῦ Δημοσθένους καὶ Κικέρωνος εξενεγκεῖν.