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CHAPITRE II. — D’AUGUSTE À DOMITIEN

vrage de Joseph nous fournit les renseignements les plus intéressants sur l’histoire morale et religieuse de la Judée, depuis le temps des Asmonéens jusqu’à celui de l’auteur, c’est-à-dire dans la période de son existence où elle s’est le plus transformée. C’est par lui surtout que nous connaissons d’une façon précise les Pharisiens, les Sadducéens, les Esséniens. Il est vrai qu’on a pu lui reprocher avec raison de chercher à helléniser ses compatriotes[1] ». La remarque est excellente, et elle indique bien en quel sens les informations qu’il donne doivent être en quelque sorte transposées. Il n’en est pas moins vrai que, sans lui, toute une partie notable des antécédents judaïques du christianisme serait presque inintelligible pour nous.

En achevant son Antiquité juive, Joseph annonçait l’intention de composer un ouvrage en quatre livres Sur Dieu et son essence et sur les lois (Περὶ θεοῦ καὶ τῆς οὐσίας αὐτοῦ καὶ περὶ τῶν νόμων)[2]. Cet ouvrage n’a probablement pas été écrit. Ce qui semble en avoir empêché la composition, ce fut l’incrédulité soulevée par les récits de l’Antiquité juive. Le public gréco-romain avait son opinion faite sur les Juifs, et il acceptait légèrement beaucoup de calomnies sur leur compte : tout ce que Joseph racontait, d’après la Bible, des origines du peuple élu, de la vocation d’Abraham, de la captivité en Égypte et de l’exode, était naturellement accueilli comme un tissu de fables. Étonné sans doute et affligé de ce jugement sommaire, notre historien comprit qu’il ne suffisait pas à un homme de sa race de raconter pour être cru, mais qu’il était encore obligé de raisonner et

    juive fut traduite en latin au vie siècle par ordre de Cassiodore, avec les deux livres contre Apion : cette version est venue jusqu’à nous.

  1. Renan, Hist. du peuple d’Israël, t. V, p. 65.
  2. Antiq. juive, l. XX, ch. xii, fin.