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JUSTUS DE TIBÉRIADE

de lui-même, et en somme une certaine médiocrité de caractère. C’était à coup sûr un honnête homme, dont la conduite dans l’ensemble semble avoir été sage et correcte, mais c’était aussi un politique, qui ne s’élevait jamais complètement au-dessus de ses préoccupations d’intérêt personnel.

Nous avons encore, sous le nom de Joseph, un discours ou plutôt une sorte de déclamation intitulée Les Maccabées ou la Souveraineté de la raison. C’est l’œuvre d’un sophiste judaïsant, où l’on ne retrouve ni l’esprit ni le style de l’historien de la guerre des Juifs.

Le nom de Joseph rappelle naturellement celui d’un autre historien juif, le Galiléen Justus de Tibériade[1], qui fut son adversaire politique, son ennemi acharné, et qui écrivit, peu après l’an 100. Il avait composé une chronique, qui embrassait toute l’histoire nationale, depuis Moïse jusqu’à la mort du roi Hérode-Agrippa II. Photius, qui la lisait encore, loue la concision du style et la rapidité substantielle du récit[2]. Joseph lui reproche formellement d’avoir écrit pour altérer la vérité[3]. Il nous est impossible aujourd’hui d’apprécier jusqu’à quel point ce reproche était fondé.

XII

Il nous reste, pour compléter le tableau de la littérature du ier siècle, à ajouter quelques mots sur la poésie de ce temps.

À vrai dire, on peut se demander s’il y a eu alors une poésie grecque. Une inspiration grande et sincère était impossible chez les Grecs humiliés et devenus les clients

  1. Suidas, Ἰοῦστος Τιβεριεύς ; Étienne de Byzance, Τιβεριάς.
  2. Photius, Biblioth., 33.
  3. Joseph, Autobiogr., ch. ix et surtout ch. lxv.