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CHAP. III. — RENAISSANCE AU IIe SIÈCLE

tracer les routes à suivre, c’est d’éclairer les obscurités ou les difficultés de la vie par des préceptes, des conseils, des réflexions, c’est de pourvoir les hommes d’une provision de bonnes idées, dont ils feront usage selon leurs besoins. La plus grande partie des ouvrages moraux de Plutarque n’est remplie que de cela.

Nature éminemment sociable, ce qu’il a en vue par dessus tout, qu’il le dise ou non, c’est le développement de la sociabilité. Il est bien moins tourné que les Stoïciens vers le perfectionnement de l’individu, bien moins exclusivement préoccupé de son indépendance. Les conseils qu’il donne, loin de tendre à détacher l’homme de ses affections naturelles, visent au contraire à les lui rendre plus chères, en y mettant toujours plus d’intelligence, plus de sagesse, plus d’idéal. C’est dans cet esprit qu’il disserte sur la famille, sur l’amitié, sur la vie civile et publique.

Ce que Plutarque disait et pensait de la famille, nous pouvons en juger encore par ses Préceptes sur le mariage, par son écrit Sur l’affection fraternelle, et par la plus grande partie de la Consolation à sa femme. Sans apporter à proprement parler des vues nouvelles sur des sujets si anciens, il a su rassembler dans ces écrits, avec grâce et délicatesse, toute la substance et en quelque sorte toute la fleur de la sagesse antique, en y mêlant quelque chose de bon et d’aimant qui lui est propre. Mais surtout, pénétré, comme il l’est, du sentiment que la nature humaine a besoin de se communiquer, il fait sentir excellemment, non seulement le charme des affections intimes, mais ce qu’elles peuvent avoir de bienfaisant, lorsqu’elles sont éclairées, lorsqu’elles élèvent ceux qu’elles unissent vers un idéal commun, lorsqu’elles deviennent un moyen de développer la vie morale. Nulle part peut-être on ne comprend mieux que chez lui pourquoi et comment la famille, quand elle donne à l’homme