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CHAP. IV. — SOPHISTIQUE SOUS LES ANTONINS

indications déjà esquissées par Denys le Thrace, il distingua toute une série de signes (στιγμαί), qui devaient marquer les rapports des phrases entre elles[1]. On lui donna pour cette raison le surnom de Στιγματίας. Son principal ouvrage traitait de la ponctuation dans Homère (Περὶ στιγμῆς) en six livres, divisés en deux parties (περὶ Ἰλιακῆς σιτγμῆς, περὶ Ὀδυσσειακῆς στιγμῆς). Il en reste de nombreux extraits dans les scolies de Venise, et ces extraits permettent d’apprécier combien les observations de Nicanor étaient liées à l’interprétation exacte du texte[2]. Il écrivit aussi Sur la ponctuation chez Callimaque et sur divers autres sujets, soit de grammaire, soit d’histoire[3].

En somme, grâce à Apollonios Dyscole surtout, la grammaire, au second siècle, tient assez honorablement son rang. On ne peut pas dire que la lexicographie, dans son ensemble, donne une impression aussi bonne. Elle dénote plus de patience que de vraie méthode, et manifeste en outre une regrettable étroitesse de vues.

La plupart des lexicographes d’alors appartenaient à la classe de puristes qui se qualifiaient eux-mêmes d’Atticistes. Les modèles classiques avaient été remis en honneur dans les écoles, comme on l’a vu plus haut, dès le temps de Denys d’Halicarnasse et de Cécilius ; quand le relèvement de la sophistique se produisit à la fin du ier siècle, ils y régnèrent sans conteste. Dès lors, on éprouva le besoin de connaître à fond la langue des orateurs d’Athènes et de leurs contemporains. D’une part, pour l’interprétation de leurs discours, il était nécessaire de savoir au juste la valeur des termes qu’on y rencontrait. Or, sans parler des termes techniques de

  1. Bachmann, Anecd., II, p. 753. Schol. in Dionys. Thrac., p. 163.
  2. Friedlaender, Nicanoris Περὶ Ἰλιακῆς στιγμῆς reliquiæ, Kœnigsberg, 1850.
  3. Fragments historiques dans C. Muller, Fr. Hist. græc. II, p. 632.