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CHAPITRE II. — PHILOSOPHIE AU IIIe SIÈCLE

peut-être simple curiosité. Quoi qu’il en soit, il revint au stoïcisme et succéda à Cléanthe en 332. Il resta plus de vingt ans à la tête de l’école. Il mourut dans la 143e Olympiade (209-205). À l’âge de soixante-treize ans selon les uns, de plus de quatre-vingts ans selon les autres.

Il avait composé 750 ouvrages, selon Diogène Laërce, qui nous en a conservé une liste interminable. De tant de volumes, il ne nous reste que de courts fragments[1]. La perte est médiocre pour l’art, car Chrysippe n’était pas un écrivain[2]. Elle est plus regrettable pour l’histoire des doctrines, car c’était, comme on l’a dit, la Somme, pour ainsi dire, du stoïcisme[3], l’arsenal où tous désormais puisèrent. Mais c’est surtout peut-être pour l’historien de la littérature que les ouvrages de Chrysippe eussent été précieux, par l’immense quantité de citations qu’ils renfermaient[4]. Chrysippe fut d’abord un grand compilateur, comme beaucoup de ses contemporains ; peu soucieux d’élégance, peu délicat de goût et d’esprit[5], mais très érudit ; ensuite un raisonneur subtil, ingénieux, paradoxal, inépuisable en ressources dialectiques[6]. On avait fait sur lui un vers : « Sans Chrysippe, pas de Portique[7]. » Un autre grand disputeur, l’Académicien Carnéade, disait plaisamment en chan-

  1. Plutarque, dans son traité De stoicorum repugnantiis, cite un assez grand nombre de passages textuels de Chrysippe. Mentionnons encore des morceaux publiés par Letronne d’après un papyrus (Fragments inédits d’anciens poètes grecs, etc., Paris, 1838), et où Bergk reconnaît un ouvrage de Chrysippe (Opuscules, II, p. 111-146). — Cf. aussi Baguet, De Chrysippi vita, doctrina et reliquiis commentationes, Annales de Louvain, 1822.
  2. Diog. L., VII, 180.
  3. Le mot est d’Ernest Havet.
  4. Id. ibid.
  5. Voir Diog. L., 183 et 187.
  6. Voir son mot à Cléanthe, dans Diog. L., 179.
  7. Diog. L., 183.