Page:Croiset - Histoire de la littérature grecque, t5.djvu/836

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
818
CHAP. VI. — DE SEPTIME SÉVÈRE À DIOCLÉTIEN

dont Eusèbe a grandement profité ; mais cette chronique elle-même n’intéresse guère l’histoire de la littérature[1].

À côté de l’histoire politique, nous pouvons placer ici l’histoire de la philosophie, qui est représentée en ce temps par l’œuvre, très médiocre, mais très renommée, de Diogène Laërce.

Personne, à ce qu’il semble, ne s’était encore avisé en Grèce d’embrasser dans un ouvrage d’ensemble l’histoire de toutes les écoles philosophiques à la fois. Chaque secte avait ses archives et ses traditions. Elle conservait avec soin la liste des maîtres qui s’étaient succédé à sa tête depuis son fondateur ; c’était un point d’honneur pour elle que de pouvoir montrer qu’elle se rattachait à lui par une filiation non interrompue. En outre, elle gardait souvent sa bibliothèque, accrue peu à peu, ses ouvrages et ceux de ses principaux successeurs, leurs testaments, qui étaient à la fois de précieux souvenirs et des titres de propriété. D’assez nombreux écrivains avaient mis à profit ces documents ; les uns, tels qu’Aristoxène, Speusippe, Hermippe, Antigone de Carystos, pour composer des biographies, les autres tels que Sotion, et après lui Héraclide Lembos, pour établir les successions des chefs d’école (διαδοχαὶ φιλοσόφων) ; d’autres encore, tels que Théophraste, Areios Didymos, Aetios, pour résumer les points essentiels des doctrines de chaque secte. Mais ces ouvrages ne touchaient qu’à des parties restreintes de l’histoire de la philosophie. Cette histoire elle-même restait à écrire.

Diogène Laërce n’était pas l’homme qui aurait pu combler cette lacune. Suivre le développement des idées, noter dans leurs transformations la part des individus et celle des temps, étudier l’entrecroisement des in-

  1. Fragm. Hist. Gr., III, p. 688 et suiv.