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PORPHYRE.

Quelques-unes des vues de Porphyre sur le monde et sur Dieu doivent être plutôt cherchées dans l’opuscule Sur l’antre des Nymphes de l’Odyssée (Περὶ τοῦ ἐν Ὀδυσσείᾳ τῶν Νυμφῶν ἄντρου (Peri tou en Odusseia tôn Numphôn antrou)). Cet antre, décrit dans l’Odyssée, n’est aux yeux du philosophe qu’une allégorie ; Homère, pour lui, a voulu représenter l’univers ; de telle sorte qu’en interprétant ses prétendues conceptions, Porphyre expose les siennes, et celles de beaucoup d’autres par occasion. On apprend ainsi quel antre d’Ithaque est à la fois la figure du monde sensible et celle du monde intelligible ; mais, en même temps, on s’instruit, comme toujours, à l’abondante érudition de l’auteur et à ses multiples citations.

La Lettre à Marcella est tout intime par le sujet et par l’intention ; nous y cherchons l’homme dans l’écrivain et nous l’y trouvons quelquefois, moins pourtant que nous ne le voudrions. Séparé de sa femme après quelques mois de mariage, Porphyre lui adresse une véritable instruction morale. La noblesse de l’inspiration générale, la gravité affectueuse, le rêve de haute et pure spiritualité sont bien de lui ; mais il entoure sa doctrine personnelle de tant de maximes prises un peu partout que sa lettre peu à peu tourne au recueil de sentences[1].

Profondément religieux, Porphyre devait être plus porté encore que son maître à transformer la philosophie en une science de Dieu (θεοσοφία (theosophia)). Cette science, nul n’eut plus à cœur que lui de la rattacher aux vieux cultes helléniques, à la religion établie, qui lui paraissait en être la forme nécessaire, seule accessible à la majorité des esprits. Pour cela, il entreprit d’en montrer le sens profond et l’accord avec les vues de la raison.

  1. Sur ces emprunts, voir Nauck, Porphyr. opusc. selecta, Præf., p. XVII. Porphyre s’est particulièrement servi des Sentences de Sextus et des écrits d’Épicure.