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CHAP. VII. — L’ORIENT GREC AU IVe SIÈCLE

la vie chrétienne (Sur la perfection, Περὶ τελειότητος ; Sur les fins conformes aux volontés de Dieu, Περὶ τοῦ κατὰ θεὸν σκοποῦ ; Sur la vie selon la vertu, Περὶ τῆς κατ’ ἀρετὴν ζωῆς ; etc.) ; et, en outre, une cinquantaine environ de Discours, dont quelques-uns, il est vrai, se rapportent encore au dogme, mais dont la plupart traitent de morale ; les autres sont des panégyriques, entre lesquels il faut mentionner l’Éloge de Basile, œuvre d’affection fraternelle en même temps que de piété, et l’Éloge de Macrina, sa sœur. Enfin la collection de ses écrits se complète par vingt-six Lettres.

La réputation de Grégoire de Nysse repose surtout sur son œuvre dogmatique. Il est probablement, entre les théologiens de ce temps, le plus philosophe, au sens propre du mot, c’est-à-dire celui qui a eu le plus le goût de la recherche, celui qui pense avec le plus de suite et d’ampleur et qui construit les plus larges théories. Homme simple et bon, de peu de sens pratique[1], tout adonné aux constructions idéales de l’esprit, il se plaît aux abstractions, au milieu desquelles il se joue avec une dialectique subtile. Sans s’écarter du dogme, qui est pour lui la vérité même, il aime à donner carrière à la raison, à multiplier les explications, à spéculer sur l’inconnu. De là, une variété d’aperçus, plus ou moins hasardés, mais personnels et intéressants, qui donnent à sa théologie une physionomie très particulière. Comme orateur, Grégoire de Nysse a, bien plus que Basile et même que Grégoire de Nazianze, les défauts de son temps, sans doute parce que l’éloquence, chez lui, est bien plus affaire d’artifice. Dépourvu par nature du don d’émouvoir, ainsi que de celui de peindre et d’animer, il y supplée trop souvent par l’enflure et par les procédés de la rhétorique.

  1. Basile, lettre 58 : Παντελῶς ἄπειρον τῶν κατὰ τὰς ἐκκλησίας.