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CHAP. VII. — L’ORIENT GREC AU IVe SIÈCLE

l’archevêque et lui écrivit elle-même une lettre de soumission. Jean, qui était déjà en Bithynie, revint triomphalement[1].

Ce triomphe même présageait sa perte. En vain, une réconciliation eut lieu ; en vain, on échangea les meilleures assurances. Sa popularité le rendait redoutable. D’ailleurs, il n’était pas homme à user désormais de plus de prudence. Quelques mois après, vers la fin de 403, à l’occasion de l’érection d’une statue de l’impératrice sur une place publique qui touchait à l’église principale, des réjouissances eurent lieu, dont le caractère païen lui parut offensant pour la religion. Il somma le préfet de les faire cesser. Le conflit recommençait ainsi sous une forme plus personnelle. L’impératrice, blessée au vif, voulut cette fois aller jusqu’au bout. Il n’est pas sûr que Jean ait réellement prononcé les paroles célèbres qu’on lit aujourd’hui en tête d’une homélie qui porte son nom : « De nouveau, voici Hérodiade en délire, de nouveau elle se met en fureur, de nouveau elle danse, de nouveau elle veut qu’on lui apporte la tête de Jean sur un plat[2]. » Mais, à défaut de ces paroles, il y en avait assez d’autres dans ses discours, qu’on pouvait interpréter comme autant d’allusions. Eudoxie fit soulever, par les évêques qui lui obéissaient, une protestation contre le rétablissement du patriarche ; et, comme il refusait de cesser ses fonctions, il fut d’abord gardé à vue chez lui, puis, vers le milieu de 404, enlevé violemment de son église et conduit en exil.

Des scènes violentes eurent lieu à Constantinople. Un incendie, qu’on imputa aux partisans de l’exilé, dévora les bâtiments attenant à la cathédrale et l’église elle-même. En tout cas, ses amis, parmi lesquels il y avait certainement des exaltés, continuèrent à former une

  1. Voir l’Homélie après son retour.
  2. Hom. sur la décoll. de S. Jean-Baptiste, exorde.