Page:Cromarty - K.Z.W.R.13, 1915.djvu/143

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

point de religion monsieur le juge d’instruction.

— C’est dire que vous croyez que cet homme est mon complice payé pour apporter un témoignage qui puisse m’innocenter.

— Non, monsieur Weld, car il faut voir les choses telles qu’elles sont. Je ne suis ni votre accusateur ni votre juge. Monsieur Suttner m’a demandé de rester ici pour empêcher l’instruction de dévier. Je fais mon devoir.

— C’est vrai, dit Suttner.

— Vous oubliez qu’il y a un coupable. Je ne dois pas en ce moment m’occuper de savoir si oui ou non ce coupable est vous. Je dois faire état de tout ce que je remarque, de tout ce que je sais, et je n’ai pas le droit de cacher la plus petite circonstance.

— Si vous croyez que j’ai pu m’entendre avec cet homme, il faudrait admettre que j’avais longuement prémédité ce crime ?

Stockton ne répondit pas.

— Que sa leçon était faite quand il est entré ici…

Stockton conserva le même mutisme.

— Et alors, si c’est moi le criminel, pourquoi, étant sorti après le crime, serais-je revenu ici ?

— Pourquoi ?

— Oui ! Admettons que j’étais ici à l’heure du crime.

— Je n’ai pas dit cela.

— Pardon, en suggérant que cet homme peut être mon complice, vous ne dites rien, mais vous laissez tout supposer ! Je tiens à mettre les choses au point, à dire, à haute voix, ce que vous pensez.

— Vous faites erreur, je ne pense rien.

— Allons donc ! Vous avez votre opinion arrêtée. Soyez franc.

— Monsieur !

— Votre silence m’accuse plus que ne pourraient le faire vos paroles.

— Je ne vous accuse pas, encore une fois. Je reste neutre. Je ne pense pas…

— Mais vous faites penser les autres. Voyons, oseriez-vous nier que votre conviction intime est que j’étais dans cette pièce à l’instant précis où le crime s’y commettait. Le témoignage de Miss Kendall n’est-il pas probant du reste ? Jeffries m’a vu entrer ici un peu avant trois heures et personne ne m’a vu sortir. J’ai donc tué Jarvis, c’est clair, c’est certain. J’aurais tué Jarvis, l’homme pour qui, après mon père, j’avais la plus grande, la plus sincère affection. Enfin, c’est admis, n’est-ce pas, je le tue lâchement, froidement. Le meurtre accompli, je sors de ce bureau. J’en sors avec une adresse telle, une telle habileté que ni Jeffries, ni Henderson, ni Helsinger ne me voient quitter ni le bureau, ni la banque. Avouez cependant qu’il est inadmissible que l’un d’eux ne se soit pas trouvé dans le salon d’attente précédant ce bureau ou dans le couloir. Ils avouent avoir fait bonne garde. Enfin, passons. Je serais sorti d’ici vers trois heures et demie. Mais alors pourquoi, si cet homme est mon complice, comme vous semblez le dire…

— Pardon ! Je ne dis rien. C’est vous qui établissez un réquisitoire terrible ! pensez-y !

— Peu m’importe ! Je puis me faire conduire à Kendall House, je serais arrivés vers quatre heures. Pensez donc à l’indiscutable alibi que j’aurais eu. Au lieu de cela, je me serais entendu avec mon complice, nous nous serions mis d’accord, je lui aurais fait répéter