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le bon ordre dans ma caisse hier soir. Rien qui ait de la valeur, sauf ma montre ! Décidément elle a de la chance, car déjà une fois à l’Alcazar…

À ce moment, comme dans un éclair, il se revit au café-concert et se rappela les moindres détails de sa soirée, notamment la figure de son voisin de droite, Stockton ! qu’il avait croisé encore au moment où il entrait chez le commissaire de police qui lui avait rendu sa montre !

Était-ce donc lui son voleur ?

Le commissaire lui avait en effet dit que le filou avait pu s’échapper ! Tous les détails de cette soirée lui revenaient peu à peu : alors, Stockton serait donc un voleur, un cambrioleur, rat d’hôtel ou de paquebot, et grec par-dessus le marché, car le gain de la veille, gain assez élevé, qu’ils avaient partagé, était sans doute illicite et dû, non pas au hasard, mais à l’adresse de l’Américain.

Mais pourquoi l’avait-il pris comme associé ? Il lui était facile de jouer seul, de s’approprier la somme gagnée tout entière ! Peut-être pour détourner les soupçons ? Souvent, dans les cercles, les grecs s’associent avec des joueurs d’une réputation irréprochable, pour mieux ainsi duper leurs victimes !

Mais alors, pourquoi entrer la nuit dans sa cabine ? Ce ne pouvait être pour dérober la part remise à Marius, puisque Stockton savait que cet argent avait été confisqué par Ketty.

Tout à coup, un soupçon traversa son esprit : la lettre de crédit sur la banque Weld ? Vite, il ouvrit sa malle de cabine : tous ses effets avaient été bouleversés, la lettre de crédit n’était plus là !

— Ah ça, mais je deviens idiot ou fou. Je l’ai laissée par prudence dans ma grande malle, sachant qu’elle ne pourrait me servir qu’à Brownsville. Donc on ne m’a rien volé, et cependant tout a été bouleversé, dans ma malle, dans mon armoire ! Mon portefeuille a été visité. Dans quel but ?

À ce moment le garçon revint, apportant le café demandé. Comme il ouvrait la porte, Marius sentit dans son oreille, non pas un bourdonnement, mais comme un léger courant d’air : l’ouverture qui pouvait faire appel d’air se serait trouvée dans la cloison ! C’était peut-être une fente ou un trou !

Un trou !

Et se rappelant sa lecture de la veille, il en déduisit qu’on avait pu forer un trou dans la cloison au-dessus de son lit et l’endormir à l’aide d’inhalations de chloroforme.

La vérification était facile : il sortit de sa cabine, passa dans le corridor éclairé à l’électricité, éteignit celle-ci, et l’obscurité faite, vit en effet, grâce au grand jour éclairant sa cabine, un trou dans la cloison, imperceptible, tant que les lampes électriques fonctionnaient, mais par où filtrait un mince rayon de lumière quand les lampes étaient éteintes.

En regardant au pied de la cloison, il découvrit juste en-dessous du trou, une toute petite boulette de cire.

Sans doute, le rat d’hôtel, trop pressé, n’avait pas assez appuyé sur la cire, et celle-ci s’était détachée.

Inutile d’ajouter que le trou de deux ou trois millimètres à peine donnait de l’autre côté de la cloison, dans sa cabine, juste au-dessus de l’endroit où se trouvait sa tête quand il était sur son lit !

Tout s’expliquait. Il avait été anesthésié. Le malfaiteur l’avait endormi d’après le procédé raconté dans « Rats et Souris d’Hôtel ».

Pour le voler ?