Page:Cromarty - K.Z.W.R.13, 1915.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

à m’effrayer ! Je deviens comme Jarvis. Tiens, le voici justement.

Jarvis, en effet, pénétrait dans le bureau.

— Tu as déjeuné ?

— Admirablement.

— Les ouvriers, tu le vois, sont au travail. Ils m’ont effrayé un peu, à propos du coffre. Écoute leur conseil : ne perds pas la clef, n’oublie pas le mot, c’est terrible à quoi nous serions exposés.

— Il faudrait égarer nos deux clefs en même temps et, pour le mot, si ma mémoire est vieille, elle est encore bonne, Dieu merci, et la tienne est jeune. À ce propos, et Jarvis emmenait Weld, loin des ouvriers, il va falloir le changer, le mot.

— Tu crois ?

— Dame, ces ouvriers…

— Oh ! tu craindrais ?

— Mon cher enfant, quand j’ai dans la caisse, en outre de nos valeurs, dix-huit millions qui ne nous appartiennent pas, j’exagère les précautions, et tu ne peux pas me donner tort. La grille est fermée, hein ?

— Certainement. Eh bien, tu changeras le mot après leur départ, car moi, je dois absolument te quitter.

— Mais alors, je serai seul à connaître le mot, et si un accident m’arrivait…

— D’abord, aucun accident ne t’arrivera, et puis c’est bien simple, tu n’as qu’à m’envoyer la nouvelle combinaison et le nombre des crans au cadran de la clef, comme tu l’as déjà fait, en te servant pour cela de notre langage conventionnel, à ma boîte, poste restante. Cela fait que si un accident te privait de mémoire, nous ne serions pas embarrassés. C’est convenu ?

— C’est convenu.

— Du reste, j’espère bien te voir cet après-midi. Tâche de venir.

— Jusqu’à quelle heure resteras-tu chez le général ?

— Je n’en sais rien, le plus tard possible, huit heures, neuf heures, je dînerai chez eux probablement.

— J’irai te rejoindre dans la soirée.

— Bravo ! Dis donc, il est grand temps que je parte. Deux heures et demie.

— Eh bien, sauve-toi. Mes amitiés et mes hommages à Miss Cecil.

— Henderson, mon chapeau, mon pardessus, je vous prie.

— Monsieur, dit Henderson en apportant les effets demandés, Monsieur Obrig est là qui demande à vous voir, vous ou Monsieur Jarvis.

— Il est dans le salon d’attente ?

— Oui, Monsieur.

— Quel ennui. Ce bureau qui n’a qu’une porte est assommant. On pense toujours aux voleurs et jamais aux gêneurs. Jarvis, reçois-le.

Jarvis alla vers la porte et l’ouvrit. Obrig entra.

— Ah, mon cher Monsieur Obrig, vous m’excuserez, il faut absolument que je parte à l’instant et tout en parlant, Weld mettait son pardessus, aidé par Henderson.

— J’aurais voulu parler cependant…

— Bah, Jarvis ou moi, c’est la même chose : il doit mieux savoir que moi ce qui vous amène, et ce qu’il a à vous répondre. Encore une fois, excusez-moi. Au revoir Jarvis…

— Monsieur, dit Henderson, qui se trouvait près du bureau de Weld, vous oubliez vos clefs sur votre tiroir !

— C’est ma foi vrai. Merci, dit Weld, en les mettant dans la poche de son paletot, et en sortant en hâte.