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LE COFFRET DE SANTAL

lustre surchargé de bougies roses, grosses et longues comme des cornes de limaçons. Dans des cheminées imprévues, des feux flambent comme des vers luisants.

Qui a mis là ces fauteuils, profonds comme des coques de noisettes et disposés en cercle, ces tables surchargées de rafraîchissements immatériels ou d’enjeux microscopiques, ces rideaux somptueux — et lourds comme des toiles d’araignée ?

Mais le bal commence. L’orchestre, qu’on croirait composé de hannetons, jette ses notes, pétillements et sifflements imperceptibles. Les jeunes gens se donnent la main et se font des révérences.

Peut-être même quelques baisers d’amour fictif s’échangent à la dérobée, des sourires sans idée se dissimulent sous les éventails en ailes de mouche, des fleurs fanées dans les corsages sont demandées et données en signe d’indifférence réciproque.

Combien cela dure-t-il ? Quelles causeries s’élèvent dans ces fêtes ? Où va ce monde sans substance, après la soirée ?

On ne sait pas.