Page:Cros - Le Collier de griffes, 1908.djvu/198

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La scène qu’elle me fit compléta ce que j’avais déterminé dans quelques scènes précédentes relativement au Mécanisme du dépit.

Et je partis, inflexible, non sans laisser des instructions précises à tous mes préparateurs pour qu’ils prissent les dernières notes nécessaires à mon mémoire, dont l’effet académique s’annonçait désormais comme devant être foudroyant.

À dire vrai pourtant, j’étais fatigué de ces recherches si patientes. Quand un chimiste étudie avec la plus grande ferveur un genre de réactions, une théorie générale, il peut du moins, aux heures de repas ainsi que pendant la nuit, quitter son laboratoire et abandonner son esprit aux faits ordinaires de la vie. Le problème que je poursuivais ne m’avait pas donné de ces congés. Il fallait être toujours prêt aux expériences ; il fallait, fuyant toute distraction, se tenir constamment à l’affût des phénomènes innombrables et compliqués qui surgissent dans ce qu’on appelle une intrigue amoureuse.

Aussi je profitai de ce répit au travail ardu. Sûr de mes subordonnés, j’oubliai un instant, dans les bals de barrières, dans les maisons de plaisir recommandées, cette tension intellectuelle ininterrompue que j’avais religieusement subie pour la plus grande gloire de science.

En revenant, dans le wagon, je me félicitais intérieurement de mon œuvre colossale accomplie. Je me