Page:Cultru - Un empereur de Madagascar au XVIIIe siècle - Benyowszky.djvu/24

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fait donc nulle mention dans ces récits des aventures extraordinaires qui devaient embellir les Mémoires publiés quinze ans plus tard. En présence des Russes qui l’accompagnaient, il lui eût été peut-être bien difficile de déguiser trop la vérité. Il n’avait pas d’ailleurs intérêt à le faire ; c’est sur ses découvertes géographiques qu’il comptait alors pour capter l’attention, tandis que, vers 1786, après la publication des voyages de Cook, il lui fallut éveiller l’intérêt par des récits romanesques que nul témoin ne pouvait plus contrôler. Stepanov et Benyowszky sont d’accord sur ce point que la garnison était très faible, incapable de résister à l’attaque d’une trentaine d’hommes déterminés. Est-il croyable que les soldats et les habitants en état de combattre, si peu nombreux, n’aient cédé que devant la crainte de voir brûler vifs leurs enfants et leurs femmes ? Cet acte de férocité, assez conforme aux mœurs orientales, paraît évidemment très licite au narrateur ; mais les autres témoins n’en parlent pas ; en tout cas, le nombre des femmes est absurdement exagéré, comme celui des Cosaques que Benyowszky porte à 800.

Quant au scribe Ryoumin, témoin et victime de l’événement, il ne donne aucun détail sur l’organisation du complot ; il dit seulement que Benyowszky (qu’il appelle toujours Beysposk ou le Hongrois) était le principal auteur. Lui et le Suédois Wymblath (dont les Mémoires ne parlent pas à ce propos), à la tête des mutins, Polonais et vagabonds, attaquèrent de nuit par surprise la maison de Nilov et le tuèrent dans sa chambre à coucher. Ils réduisirent ensuite la chancellerie où étaient les munitions et les approvisionnements, y établirent une forte garde après avoir fait prisonniers les quelques soldats de service qui n’osèrent résister. La ville était petite, non fortifiée, il n’y avait que 70 cosaques en y comprenant les vieillards et les enfants ; encore n’étaient-ils pas tous là. C’était dans la nuit du 26 au 27 avril. Le 27 au matin, Benyowszky fit saisir et enfermer comme otages, dans la chancellerie, les scribes Spiridon