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réflexions

dont ils émanent ; qu’ils rassemblent tous les temps, qu’ils s’augmentent du passé et qu’ils anticipent sur l’avenir. Et s’il n’est point de mari délicat dont la tendresse ne fût affoiblie par la certitude ou le simple soupçon que sa veuve lui donneroit un successeur, l’on doit croire que la crainte d’en être abandonné pendant sa vie altéreroit absolument son bonheur et ses affections. Ceux qui ne doivent pas donner une préférence, même en imagination, oseroient-ils s’en imposer par l’indécente menace de séparation ou d’infidélité ?

Les affections naissent et se développent par l’espérance d’un long avenir ; et ensuite elles s’augmentent, s’ennoblissent et se fortifient par leur propre durée. Quelle amitié peut être comparée à celle de deux époux que les déférences, l’estime et le bonheur de toutes leurs heures ont liés depuis longtemps, qui rappellent continuellement le prodige du tison de Méléagre ; puisque l’un des deux se consume dès que l’autre paroît languir, et qu’ils ne voient dans la mort même que le plus désiré de tous les instans, s’il les réunit, et le plus redoutable de tous, s’il les sépare ? Arrie le prévient, pour ne