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PIERRE CURIE

vivre ; les femmes de génie sont rares. Aussi lorsque poussés par quelque amour mystique, nous voulons entrer dans quelque voie antinaturelle, lorsque nous donnons toutes nos pensées à quelque œuvre qui nous éloigne de l’humanité qui nous touche, nous avons à lutter avec les femmes ; — et la lutte presque toujours est inégale, car c’est au nom de la vie et de la nature qu’elles essaient de nous ramener ».

On voit, d’autre part, dans la correspondance citée plus haut, la confiance inébranlable qu’il avait dans la science et dans le pouvoir de celle-ci pour le bien général de l’humanité ; et il semble légitime de rapprocher ce sentiment de celui qui dicta à Pasteur les paroles bien connues :

« Je crois invinciblement que la science et la paix triompheront de l’ignorance et de la guerre ».

Cette confiance dans les solutions scientifiques rendait Pierre Curie peu enclin à prendre une part active à la politique. Il était attaché par éducation et par sentiment aux idées démocratiques et socialistes, mais il n’était dominé par aucune doctrine de parti. Il remplit, d’ailleurs, toujours ses obligations d’électeur, ainsi que le fit son père. Dans la vie publique comme dans la vie privée, il ne croyait pas à l’emploi de la violence :

« Que penseriez-vous, m’écrivait-il, de quelqu’un qui songerait à se jeter la tête la première contre un mur de pierre de taille, avec la prétention de le renverser ? Cela pourrait être une idée résultant de très beaux sentiments, mais, de fait, cette idée serait ridicule et stupide. Je crois que certaines