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MM. Rutherford et Soddy[1] ont comparé le débit d’émanation des différents composés solides de thorium dans des conditions déterminées, en entraînant par un courant d’air de vitesse connue l’émanation produite par un poids connu de substance placée dans un vase plat, et en envoyant ce courant d’air dans un condensateur de mesures. Après 10 minutes un état stationnaire est atteint. L’expérience a montré que, pour les vitesses de courant d’air employées, le courant de saturation était proportionnel au poids de matière jusqu’à 20g. Il résulte de cette étude que les composés de thorium ont un pouvoir de dégagement d’émanation qui varie dans de très larges limites. C’est ainsi que l’hydrate de thorium émet à poids égal deux à trois fois plus d’émanation que l’oxyde de thorium du commerce. Le nitrate de thorium à l’état solide ne dégage que de la quantité d’émanation fournie à poids égal par l’oxyde de thorium. Divers échantillons de carbonate se comportent d’une manière très différente suivant leur mode de préparation.

Pour l’oxyde de thorium la faculté de dégager l’émanation est deux ou trois fois plus grande dans les gaz humides que dans les gaz desséchés.

Le dégagement d’émanation est facilité par une élévation de température[2]. L’oxyde de thorium chauffé au rouge dans un tube de platine dégage trois ou quatre fois autant d’émanation qu’à froid. Tant que la température est maintenue constante, la vitesse de dégagement de l’émanation conserve cette valeur élevée, mais elle reprend sa valeur primitive lors du refroidissement. Si toutefois le produit a été chauffé au blanc, le pouvoir de dégagement est grandement réduit, et après refroidissement ce pouvoir tombe à une valeur qui ne constitue que 10 pour 100 de la valeur primitive. Quand le produit est dans cet état, M. Rutherford le nomme déémané.

Le pouvoir de dégager l’émanation diminue pour l’oxyde de thorium quand la température s’abaisse ; à la température de l’acide carbonique solide il est dix fois plus petit qu’à la température ordinaire ; il reprend sa valeur primitive par réchauffement.

  1. Rutherford et Soddy, Phil. Mag., 1902.
  2. Rutherford, Phys. Zeit., 1901.