Page:Curwood - Kazan, trad. Gruyer et Postif.djvu/229

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Le tumulte s’apaisa et les yeux se reportèrent à nouveau vers la cage. Kazan était venu, en effet, se placer en face de l’énorme danois et celui-ci avait commencé à dévisager Kazan.

Puis le chien-loup s’avança imperceptiblement. Avec prudence, il se préparait à bondir sur son adversaire, ou à se jeter de côté, s’il y avait lieu. Le danois l’imita. Leurs muscles à tous deux se raidirent. On aurait pu, dans la salle, entendre maintenant le vol d’une mouche. Sandy et Harker, debout près de la cage, respiraient à peine.

Les deux bêtes, pareillement splendides, les deux lutteurs de tant d’impitoyables batailles, allaient sans nul doute, par la cruelle volonté des hommes, livrer leur dernier duel. Déjà les deux animaux s’affrontaient.

Mais, à ce moment, que se passa-t-il en eux ? Est-ce O-se-ki, le Grand Esprit des Solitudes, qui opéra dans leur cerveau et leur fit comprendre que, victimes de la barbarie humaine, ils avaient l’un envers l’autre un impérieux devoir de fraternité ?

Toujours est-il qu’à la seconde décisive, alors que toute la salle, haletante, s’attendait à une mutuelle prise de corps, imminente et féroce, on vit le gros danois lever lentement sa tête vers les lampes à pétrole et esquisser un bâillement.

Harker, qui voyait son champion offrir ainsi sa gorge aux crocs de Kazan, se mit à trembler de tous ses membres et à proférer d’affreux blasphèmes. Kazan pourtant ne bondit pas. Le pacte de paix avait été mutuellement scellé entre les deux adversaires qui, se rapprochant l’un de l’autre, épaule contre épaule, parurent regarder avec un immense dédain, à travers les barreaux de leur prison, la foule à nouveau furieuse.

Ce fut, cette fois, une explosion de colère, un mugis-